Titus est une figure historique paradoxale. Son règne est court, deux ans (79-81 apr. J.-C.) mais une tradition, presque uniquement favorable, fit de lui un empereur idéal, incarnant «l'amour et les délices du genre humain». Son nom est également attaché à l'un des monuments antiques les plus célèbres, le Colisée, qu'il a inauguré. Tout au long des époques médiévale et moderne, la culture occidentale n'a cessé d'entretenir cette image positive. En 1670, Corneille et Racine ont immortalisé ses amours avec Bérénice, tandis qu'en 1791 Mozart lui a consacré son ultime opéra, la Clémence de Titus. Cette tradition est d'autant plus surprenante qu'elle oblitère la face sombre du personnage. C'est pour cela que nous devons voir ce personnage de plus près.
Titus né en 39, est très populaire, démontrant de réels talents militaires, il seconde son père, comme tribun militaire en Germanie et en Bretagne en 61, puis légat de la legio XV Apollinaris (la 15e légion d'Apollon) en 67 en Judée, entre deux il retourna à Rome en 64, où il pratiqua le droit, se mariant Arrecina Tertulla morte peu de temps après, puis convole en seconde noce avec Marcia Furnilla. Il eut une fille Julia. À partir de 69, alors que Vespasien vient d'être proclamé empereur par ses légions à Alexandrie, il laisse le commandement de la guerre en Judée à son fils Titus, ce dernier est aussi appelé César, et reçoit l'appellation de prince de la jeunesse en 69. Assisté par Tibère Alexandre, ancien procurateur de Judée et préfet d'Egypte, il est à la tête de 50 000 hommes, et fait preuve d'une certaine efficacité. Celui-ci permet de remporter la guerre contre les Juifs à Rome en 70 avec la prise de Jérusalem et la destruction du Temple, puis Vespasien célèbre avec lui le triomphe en 71, ce qui lui valut les honneurs d'un triomphe qui a été sculpté sur l'arc dit de Titus, au Forum romain.Après son succès à Jérusalem, il est très associé au pouvoir : doté de la puissance tribunitienne en 71, de l'imperium sans doute au même moment, sept fois consul en 70, 72, 74, 75, 76, 77, et 79, il exerce la censure entre 73 et 74 avec son père, moment où avec lui il accomplit un recensement qui permet de renouveler largement le Sénat et l'ordre équestre, et devient même préfet du prétoire à partir de 72, alors que même cette fonction est réservée à un chevalier. Il promeut aussi des familles au patriarcat. Sous le titre d'Auguste, il fut cependant un véritable co-régent et son influence fut certainement forte sur la plupart des décisions prises par Vespasien. Il est cependant très critiqué pour la liaison qu'il entretient avec la princesse juive Bérénice qu'il a fait venir à Rome en 75.
Titus devient empereur à la mort de son père en 79 sans aucune difficulté ni opposition, ce qui montre l'efficacité dynastique menée par Vespasien. Il renvoie à contrec½ur Bérénice, cette liaison était très impopulaire. Il écarte Domitien, vénère des divinités orientales qui renforçaient le culte impérial (Isis), et il agit en tout avec prodigalité. Pourtant, en matière monétaire, Titus était frugal et ne faisait pas de dépenses inutiles. Mais, pour montrer son sens de la mesure et apaiser le Sénat, il fit poursuivre les délateurs et refusa les procès de majesté. Les hauts fonctionnaires et les amici (amis) étaient bien choisis et son activité législative tendait à se concentrer sur les mesures sociales populaires, l'armée étant particulièrement bénéficiaire dans les domaines de la propriété foncière, du mariage et de la liberté testamentaire. Le principal événement du règne est l'inauguration du Colisée, ou amphithéâtre flavien qu'il a terminé, en 80, auquel s'ajoute des thermes et un arc de triomphe à Rome, et de nombreuses bornes milliaires qui attestent son souci du réseau routier. Il renforce aussi les forts à l'Est et le long du Danube. Mais le règne est assombri par diverses catastrophes : éruption du Vésuve en 79 qui détruisit Pompéi et Herculanum, incendie de l'Urbs (Rome) en 80, et une épidémie de peste en 81. C'est sans doute cette épidémie qui emporte Titus en septembre 81.À regarder de plus près, Titus a un bilan peu flatteur. Titus est d'abord, avec son père Vespasien, le responsable de la terrible répression de la guerre de Judée (68-74) et de la destruction du Temple de Jérusalem, un drame pour le peuple juif qui en entretient la mémoire depuis deux mille ans. Le fait est suffisamment rare pour être signalé : Titus est ainsi l'un des rares empereurs connu également par des textes non romains qui lui sont violemment hostiles. Par ailleurs, il participa aussi, aux côtés de son père, à la répression contre les adversaires de la dynastie flavienne qui gouvernera Rome jusqu'en 96. Enfin, son règne est marqué par une série de catastrophes dont la plus fameuse, l'éruption du Vésuve, détruisit Pompéi et Herculanum. L'empereur que l'on surnomma «les délices du genre humain» eut aussi un arrière plan plus sombre.
Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures : Jean-Pierre Martin, Alain Chauvot, et Mireille Cébeillac-Gervasoni, Histoire romaine, Armand Colin, 2014, Christian-Georges Schwentzel, Laurent Lamoine, et Blaise Pichon, Le monde romain de 70 av. J.-C. à 73 apr. J.-C., SEDES-Armand Colin, 2014, Philippe Tarel, Titus, Ellipses, 2016, Yannick Clavé, Le monde romain : VIIIe siècle av. J.-C. - VIe s. apr. J.-C., Armand Colin, 2017, Yann LE BOHEC, « TITUS FLAVIUS VESPASIANUS (39-81) - empereur romain (79-81) », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 11 janvier 2018. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/flavius-vespasianus-titus/, et http://www.roman-emperors.org/titus.htm.
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