Les loisirs au Moyen-Âge, ou comment rendre plus supportable le travail

Du haut en bas de l'échelle sociale, à la ville comme à la campagne, l'homme médiéval pratique une foule de distractions. Les moments de détente, les distractions ne sont point inconnues, mais, bien plus que de nos jours, les loisirs sont intégrés au travail.

 

Les nobles chassent cela relève du plaisir, de l'activité physique – facteur important pour garder la forme en temps de paix – et du bonheur d'être au grand air, se pratiquent de différentes façons comme la vénerie (chasse à courre) ou la volerie, qui chez les bourgeois fait aussi office de distraction favorite, assistent aux fêtes de cour, festoient avec des repas copieux, quelle que soit la période du Moyen-Âge étudiée, on reçoit dans des salles richement décorées, où la musique résonne et où l'on aime danser, on y mange des viandes grillées ou rôties, on y boit des vins d'Orient et l'on aime y deviser, il doit s'agir d'un moment propice au délassement et une fois le repas terminé, on enlève habituellement les tables et les convives continuent à boire jusqu'à ce qu'ils deviennent complètement ivres, ou aux tournois à cheval qui étaient également très prisés par le peuple, car ils faisaient office de véritables spectacles et permettaient aux participants de remporter des sommes d'argent, en plus de pouvoir s'entraîner pour partir à la guerre, et pour y participer, les plus jeunes passaient des heures à apprendre la boxe et la lutte afin de pouvoir un jour monter à cheval, lance en main, lisent car la lecture s'ouvre à l'aristocratie et à la bourgeoisie augmente la charge de travail des ateliers monastiques, responsables de la copie de textes qui pour répondre à une demande toujours croissante de textes fiables et de plus en plus diversifiés (bibles universitaires, traités juridiques et théologiques, manuels de pastorale, romans de chevalerie), des ateliers de copistes civils voient le jour, font de la musique car les troubadours et les trouvères (appelés Minnesänger en Allemagne) sont des musiciens des XIIe et XIIIe siècles en Europe, sont presque tous issus des familles nobles – car l'enseignement de l'écriture était réservé aux castes supérieures –, ils sont d'abord chevaliers avant d'exprimer leurs "sentiments courtois" en poésie et en musique, relayés parfois par les jongleurs ou donnant le ton pour les danses de cour, en s'accompagnant d'instruments divers : flûtes, tambours, harpes, vièles ou vielles à roue, psaltérions, etc., Mais il n'y a pas que les nobles qui aiment à festoyer, le bourgeois aussi puisque le Ménagier de Paris, ouvrage qu'un bourgeois parisien compose à la fin du XIVe siècle, nous apprend, entre autres, comment les repas sont organisés.

 

Les autres, bourgeois, et même prêtres, participent à d'innombrables fêtes comme avec Noël, bien sûr, où l'«on décore la maison, on s'habille de neuf», où l'on tue le cochon pour proposer un bon repas et puis où l'on se rend aux différentes messes de la nuit, et autour de Noël, des enfants prennent la place des prêtres, on célèbre même une messe de l'Âne, vient ensuite, le 28 décembre et la fête des Saints Innocents, le Nouvel An, la fête des Rois puis un peu plus tard, le 2 février, la Chandeleur, suivent, tout au long de l'année, d'autres fêtes que nous connaissons bien, le Mardi Gras, les Rameaux, Pâques, les fêtes de la Saint Jean (Baptiste), la Toussaint, etc.  Mais certaines, comme le cycle Carnaval-Carême où pendant quelques jours, la ville s'anime et le bruit, les déguisements et les excès de gourmandise sont légion, ou le cycle de Mai, durent plusieurs jours et l'Église cherche à limiter les "débordements" et à codifier les résurgences païennes. Parfois tolérés et encadrés par l'institution religieuse, ces événements sont parfois interdits. Ces fêtes religieuses liées au cycle agricole sont l'occasion de “fêtes de renversement temporaire” où la hiérarchie sociale s'inverse, où le rire est roi. Toutes ces fêtes étaient autant d'occasions de se réunir, de bien manger (ce qui était assez rare à l'époque), de s'amuser, et bien souvent, aussi, d'un peu trop boire. Bien évidemment les hommes d'Église condamnaient ces débordements, même la danse était pour eux répréhensible, surtout concernant les jeunes filles, «lorsqu'elles dansent, le contact des mains, les pressions des pieds, les entretiens secrets les poussent à pécher dans une société si indulgente aux rencontres galantes.»

 

Tous boivent ferme puisque pour occuper les moments où ils ne travaillent pas, la plupart des hommes vont à la taverne, dont on en dénombre plus de 4000 à Paris à la fin du Moyen-Âge et bien sûr vin et cervoise y coulent à flots, et on peut y faire la rencontre de filles de joie, environ trois mille à Paris «intra muros» vu que «que presque tous les hommes mariés ont eu des rapports avec des prostituées durant leur jeunesse», pratiquent le sport avec les équipes villageoises jouent à la soule comme aujourd'hui on joue au football, ou les combats d'animaux, et notamment de coqs, suscitaient de leur côté un véritable enthousiasme chez les paysans, qui n'hésitaient pas à bien les nourrir pour en faire d'excellents combattants, et les jeux de société comme les dés qui n'ont pas bonne presse car utilisés pour des paris basés sur le hasard, reviennent à remettre en cause l'omnipotence divine, les jeux de dames qui touchait eux aussi, l'ensemble de la population, malgré leur mauvaise réputation auprès de l'Église, les cartes à jouer, les échecs venus d'Orient et très appréciés des nobles, sont l'image de la stratégie politique mais aussi de la conquête amoureuse, ou plus triviaux comme colin-maillard, ou pour les enfants les cerceaux, osselets, marrons ou ballons, tout en se confectionnant leurs propres jouets, et aimant également pêcher et construire des cabanes en bois, ils aiment aussi aller au théâtre avec des troupes itinérantes qui se servent de roulottes en guise de scène, parfois de chapiteaux, dans les pièces représentent généralement des scènes religieuses ou mythiques qui peuvent durer plusieurs journées, le spectacle se passe aussi dans la rue où de nombreux jongleurs, montreurs d'animaux, charlatans, etc., sont présents, aiment aussi assister aux exécutions, fréquentent les bains publics peu cher, favorables à la détente, à l'exercice physique et permettent de maintenir une certaine hygiène et théoriquement les hommes et les femmes ne peuvent y aller en même temps, la luxure y est bannie, et parfois les bordels puisque la croissance des villes entraîne à partir du XIIe siècle un essor vertigineux de la prostitution, tolérée par l'Église comme un moindre mal, elle trouve même un cadre privilégié avec l'invention du bordel municipal, créé et encadré par les autorités publiques et devient un lieu d'apprentissage d'une sexualité conforme à la morale chrétienne...

 

Au Moyen-Âge, loisirs et travail étaient autrefois étroitement imbriqués pour les travailleurs, mais montre que quelles que soient les périodes, l'Homme a toujours aimé jouer et ripailler.

 

Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures qui m'ont beaucoup aidé : Jean Verdon, Les loisirs au Moyen-Âge, Tallandier, 1996, et https://actualitte.com/article/34391/chroniques/sans-reseaux-sociaux-on-savait-pourtant-s-amuser-au-moyen-age,  Pierre Aubry, Trouvères et troubadours, Bleu Nuit Édition, 2018, https://gallica.bnf.fr/html/und/livres/ouvrages-profanes?mode=desktop, https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/moyen-age-etaient-principaux-loisirs-moyen-age-5556/, https://www.lhistoire.fr/%C2%AB%C2%A0au-moyen-age-%C3%A0-chaque-ville-son-bordel%C2%A0%C2%BB, et https://www.vaux-sur-mer.fr/agenda/conference-la-fete-et-les-jeux-au-moyen-age/.

 

Merci !