L'Épiphanie, un récit symbolique inspiré d'événements historiques d...

Aujourd'hui, nous fêtons l'Épiphanie qui est une fête baptismale chez les Grecs, puisque les écrits patristiques montrent qu'en Orient, c'est le baptême du Christ qui est célébré en ce jour, tandis qu'elle est une fête de naissance chez les Latins, qui est sa manifestation à tous les peuples puisqu'en Occident, celle-ci est symbolisée par les mages. L'Épiphanie est traditionnellement fixée dans le calendrier chrétien au 6 janvier, soit douze jours après la naissance de Jésus selon la liturgie romaine. Le 6 janvier tombant régulièrement en pleine semaine (un jeudi pour l'année 2022) après les vœux de bonne année, une réforme a toutefois transféré la date au second dimanche suivant Noël.

Matthieu affirme que "Jésus est né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode" et ajoute que "des sages sont venus à Jérusalem..." alertés par l'apparition d'une étoile sont venus d'Orient pour voir où le roi des Juifs devrait naître. Les prêtres et les scribes du peuple (Jérusalem) savent que le roi davidique devait y naître (Matthieu 2,1-6; Michée 5,2; et 2 Samuel 5,2), contrairement Hérode, roi illégitime (résidant à Jérusalem) qui s'est renseigné auprès d'eux. Les mages se remettent en route, guidés par l'étoile, trouvent l'enfant, lui rendent hommage (or, encens et myrrhe), décident de ne pas retourner vers Hérode et de rentrer chez eux. L'introduction des mages dans le récit de la nativité de l'évangile de Matthieu est influencé par la visite à Rome en 66 dur roi d'Arménie, Tiridate, et ses courtisans que Pline le Jeune nomme Magi (Histoire Naturelle 30,6,16-17), qui est venu à Rome pour adorer l'empereur-dieu Néron comme les Mages de Matthieu vienne pour vénérer le Messie des juifs nouveau-né. Et une curieuse coïncidence puisque Matthieu prête l'attention à un détail donné par Dion Cassius puisqu'après que Tiridate est confirmé roi par Néron, ce groupe de Mages comme celui du Nouveau Testament ne reprend pas la même route pour revenir (Histoire romaine 63,1-7). Mais une autre inspiration pour les mages serait plus historique sur tout pour leur prédiction d'un futur roi. Ils n'avaient pas besoin d'être chaldéens ou perse pour représenter la sagesse. Hérode tenait les esséniens en haute estime et cela viendrait de Menahem qui lui a annoncé qu'il deviendrait roi des Juifs durant son enfance. Devenu roi Hérode, l'appela à la cour pour qu'il lui prédise l'avenir, puisque les esséniens étaient réputés pour leur connaissance des choses divines. Ce dernier fréquentait la cour royale, sortit et fut remplacé par Shammai. Il fut chassé de la cour après qu'Hérode le vit venir avec 160 hommes et une armure d'or prêt à partir pour la guerre eschatologique, voyant en lui un ennemi politique. D'autres sages, les Pharisiens qui se targuaient du don de prophétie, prédirent en l'an 7 ou 6 avant J.-C. que le trône d'Hérode passerait à son frère Phéroras et à sa descendance, ce que ne pouvait tolérer le roi, et ce qui le poussa à demander un serment de fidélité aux Pharisiens en l'an 6 avant J.-C., ce qu'il refusèrent et durent payer une forte amende, que la femme de Phéroras leur offrit comme cadeau de cette prédiction. Comme on peut le voir les rédacteurs de l'évangile reprirent des événements historiques en lé détournant afin de démonter que Jésus était le vrai 'roi des Juifs' dès sa naissance et son enfance.

L'évangile expose ainsi la naissance d'une manière théologique (Matthieu 1,22-23; 2,5-6.15.18.23), suivant l'Écriture, pour ajouter que des sages sont venus de l'orient, guidés par l'étoile (Nombres 24,17), et que Jésus dut fuir Hérode en répétant le chemin de l'Exode (d'Égypte j'appelai mon fils : Matthieu 2,15; Osée 11,1). Jésus partage et surmonte ainsi le sort de Moïse, libéré de la mort, quittant l'Égypte (Matthieu 2,1-15), d'où il reviendra à Nazareth, en tant que Fils de Dieu (Matthieu 2,15) et d'un Nazoréen, descendant de David (Matthieu 2,23), prenant le schéma narratif de l'enfant qui échappe au meurtre qui est un modèle universel, un stéréotype servant à légitimer le leader destiné à fonder de nouvelles règles, normes sociales et institutions comme Moïse avec les Tables de la Loi, puisque l'évangile veut montrer que Jésus est un nouveau Moïse, et le récit de la visite des rois mages à Bethléem dans l'Évangile de Matthieu (Matthieu 2) paraît inspiré par la propagande messianisante d'Hérode, puisque Hérode ayant voulu passer pour un messie afin de légitimer son règne, le nouveau-né de Bethléem lui apparaît comme un dangereux rival à éliminer; d'où le thème, créé par l'évangéliste ou par sa source, de l'inquiétude du roi lorsque se manifeste l'étoile messianique (Matthieu 2,3). Mais le passage suggère également l'erreur d'appréciation d'Hérode : sa conception du messianisme est politique et «ethnique» comme le montre la représentation de l'astre sur ses monnaies qui symbolise la royauté, désignant l'onction divine du monarque juif, considéré comme un roi messie, «Oint du Seigneur». L'étoile est, en effet, associée à David (1 Samuel 14,12), ainsi qu'à la royauté dans la prophétie de Balaam : «Je le vois, mais ce n'est pas pour maintenant; je l'observe, mais non de près : de Jacob monte une étoile, d'Israël surgit un sceptre qui brise les tempes de Moab et décime les fils de Seth» (Nombres 24.17). Il est vraisemblable qu'Hérode ait voulu se présenter lui-même comme ce roi guerrier annoncé par la tradition juive; l'étoile renvoyant à la royauté davidique et aux prétentions messianiques du souverain, alors que Jésus incarnera une figure messianique différente, à vocation universelle, un Prince de la paix. Le nouveau-né n'est donc pas un concurrent du roi par la force, mais par l'humilité et la simplicité, d'où la reprise du symbole l'astre se levant sur Jésus au lieu du mauvais roi. Même si une conjonction entre Jupiter et Saturne dans la constellation des Poissons, qui se produisit à trois reprises (entre le 29 mai et le 8 juin, entre le 26 septembre et le 3 octobre, et entre le 5 et le 15 décembre) en l'an 7 avant J.-C. au moment où Jésus était né, et que ses parents et sa famille auraient pu y voir un signe exceptionnel à son sujet puisqu'on pensait que le Messie naitrait lorsq'une telle conjonction apparaîtrait, car Jupiter était chez les Juifs le symbole de la Royauté, Saturne celui d'Israël, et la constellation des Poissons (autrefois appelée les Queues) celui des Pays de la mer, Palestine et Syrie, cependant Matthieu ne se soucie pas des étoiles extérieures, ni qui est venu à Bethléem ou à Nazareth pour enquêter sur ce qui s'est passé, mais à la place a pris des passages de la Bible même s'il s'inspiré d'événement historique réels, pour découvrir ce qui a été promis, selon l'expérience de l'Église (vers 70/80), dont il a projeté la foi sur la naissance de Jésus.

L’Épiphanie, un récit symbolique inspiré d’événements historiques devenue une belle tradition dans les Flandres française, et la Saint-Basile ou comment rendre honneur de façon festive à un Père de l’Église

Pour l'épiphanie, une tradition perdure dans les Flandres françaises, trois Rois mages vont de maison en maison pour une tournée gratuite et conviviale. Ils chantent, boivent un coup, discutent avec les habitants. Une dizaine de visites par jour entre Noël et l'Epiphanie. Les Rois Mages en Flandres (entre Bailleul et Steenvorde), c'est une tradition lointaine. Perdue puis retrouvée grâce à quelques passionnés en 2000. À l'origine de cette tradition, les enfants allaient chanter des chants de Noël et faire la quête dans les maisons. Puis dans certains pays ou territoires, les rois mages ont pris le relais. Aujourd'hui ils sont une quinzaine de l'association De Katjebei à sillonner la Flandre entre Noël et l'Epiphanie. Rue après rue, les Rois mages chantent aux villageois la chanson flamande "Starrekelied", la chanson de l'étoile. Mais il a fallu beaucoup d'ardeur et de patience pour permettre cette aventure, car sur le village de Boeschepe, cette tradition s'est continuée jusqu'en 1984 mais sur Saint-Jans-Cappel, elle était déjà arrêtée. Au départ, les trois Rois mages s'appelaient en réalité Cyril, Gilles et Jean-François. Trois passionnés et d'autres compagnons, qui décidèrent de redonner vie il y a dix ans à une ancienne tradition ancestrale, tombée dans l'oubli. Le site de l'association précise les objectifs de cette tournée des Rois Mages : Cette tournée a différentes fonctions : elle colporte et renforce le message biblique dans une communauté chrétienne flamande très croyante, elle sert également de quête pour les plus dépourvus : pain, beurre, vin, argent et surtout les gaufrettes : lukje ou stryntje, et cette tournée représente la sauvegarde de souvenirs transmis de génération en génération, de siècle en siècle. C'est la transmission de l'histoire d'un peuple, c'est la mémoire de l'ethnie flamande. L'événement touche surtout des grands qui se remémorent ainsi leur enfance, mais aussi les petits. Face à cet enthousiasme, il est courant que les habitants donnent un peu d'argent. L'association De Katjebei pour faire quelque chose de cet argent reverse l'intégralité à des associations locales et on essaye de changer chaque année. Pour être au plus près de la réalité, les membres de l'association se sont beaucoup renseignés : "On a appris que des traditions similaires avaient lieu en Belgique ou même en Pologne où les enfants vont toquer aux portes au moment de l'épiphanie". Ils ont aussi retrouvé les photos des rois mages des années 1950 à 1970 : "La plupart sont décédés depuis mais on a réussi à remettre les noms sur les photos et on a organisé une exposition de toutes les informations qu'on a récoltées sur le sujet pour nos dix ans." En janvier 2021, le long de la frontière, de Bailleul à Winnezeele, la tradition a pris une résonance triste. Les différentes équipées de Rois mages avaient décidé d'annuler leurs tournées en raison du contexte sanitaire. On verra si c'est possible cette année.

Pour aller plus loin, je vous conseille ces lectures qui m'ont beaucoup aidé : Frédéric Manns, Les enfants de Rébecca : judaïsme et christianisme aux premiers siècles de notre ère, Médiaspaul, 2002, Geza Vermes, The Nativity: History and Legend, Penguin Books, 2006, Jean-Christian Petitfils, Jésus, Fayard/Livre du Poche, 2011, Dictionnaire amoureux de Jésus, Plon/Tempus, 2015, et https://www.vaticannews.va/fr/eglise/news/2020-12/naissance-de-jesus-que-dit-l-historien.html, Christian-Georges Schwentzel, Hérode le Grand. Juifs et Romains, Salomé et Jean-Baptiste, Titus et Bérénice, Pygmalion, 2011, Xavier Pikaza, Historia de Jesús, Verbo Divino, 2013, https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/2014/01/02/tradition-comme-les-rois-mages-en-flandres-387189.html, https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/nord-0/flandres-ils-perpetuent-tradition-rois-mages-1395933.html, https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/nord-0/flandres-rois-mages-continuent-passer-maison-maison-partager-moment-convivial-1769473.html, https://theconversation.com/jesus-a-t-il-echappe-a-une-tentative-de-meurtre-alors-quil-etait-bebe-151431, et https://www.lavoixdunord.fr/915544/article/2021-01-02/flandre-cette-annee-pas-de-rois-mages-entre-la-poire-et-le-fromage.

Aujourd'hui nous fêtons aussi la Saint-Basile, un des plus grands Père de l'Église, qui distribue en Grèce aux enfants sages des cadeaux et des friandises.

Promis à une brillante carrière comme rhéteur païen suite à des études prestigieuses Césarée, à Constantinople, enfin à Athènes où il se lie d'amitié avec son compatriote Grégoire de Nazianze, un grand poète et grand théologien, Basile de Césarée (330-378), issu de l'aristocratie de la principale ville de Cappadoce, sans être un ermite, préféra l'ascèse et la vie en communauté dans un lieu retiré après une carrière de rhéteur en 356, sa conversion et son baptême (357, moment où il est ordonné lecteur) suite à l'influence d'Eustathius de Sébaste et au voyage que les deux ont partagé en Syrie, en Palestine et en Égypte, puis fonde des monastères dans les années 368-369, la terrible famine qui sévit en Cappadoce l'amène à vendre une part de ses terres et à plaider auprès des milieux aristocratiques, qu'il connaît bien, pour la générosité et une plus juste répartition des terres et des biens, et devient évêque de la ville de Césarée en 370 après avoir été ordonné diacre en 360 et prêtre en 364, ce qui provoque une crise dans ses relations avec son frère le philosophe Grégoire de Nysse. C'est un homme de combat, qui ne refuse pas l'affrontement, qui le cherche même parfois comme quand il écrit contre Eunome, défenseur de l'arianisme, en 365, s'opposant à lui avec Grégoire de Nazianze et son frère Grégoire à Nysse, et compose des traités dogmatiques aidé par Grégoire de Nazianze. Conformément à son opposition permanente à l'arianisme, Basile a assisté au concile de Constantinople en 360, tout en s'opposant à l'empereur Valens en 364, même si sa position envers lui était conciliante et a plus à voir avec la division de la Cappadoce en 2 provinces.

Intransigeant avec ses frères, il est menacé en 371 par les évêques ariens et par Modestus, s'entretient avec l'empereur Valens en 372, tout en obligeant Grégoire de Nazianze à être consacré évêque de Sasima, ce qui provoque leur brouille, et son frère Grégoire à Nysse qui se fera déposé en 375, afin de ne pas être minoritaire en Cappadoce, et se fait conciliant avec les païens ou les érudits attachés au paganisme, mais n'hésite pas à dénoncé son ancien ami Eustathius lors du synode d'Iconium en 376. Pragmatique, il allie les élans mystiques avec un bon sens pratique, n'étant pas aussi radical que les autres dans la lutte contre l'hérésie, mais qu'il a plutôt adopté une position conciliante qui cherchait à combler le fossé dans l'Église. Il élabore ainsi la doctrine de l'Esprit-Saint, approuvée au Concile de Constantinople (381). Autour de ses monastères, il développe des Basiliades, des auberges pour voyageurs et commerçants où les mendiants de longue date étaient invités à travailler. Malheureusement, Basile n'a pas vécu pour assister au triomphe final de l'orthodoxie. La date généralement acceptée de sa mort est le 1er janvier 379, bien que certains chercheurs la placent plus tôt, en 377 ou 378.

Mais en Grèce, la figure éminente liée aux cadeaux, c'est Saint Basile (Agios Vasilis), qui était l'évêque de Césarée en Cappadoce. Saint Basile est connu pour ses soins aux pauvres et aux défavorisés, en particulier à l'époque de Noël où il offrait des cadeaux aux jeunes enfants. La fête de Saint Basile tombe le premier janvier et il est le saint responsable de la tradition grecque de manger une Vasilopita, un pain ou un gâteau sucré avec une pièce porte-bonheur cachée à l'intérieur, le jour du Nouvel An. Les Grecs ont depuis continué à associer Saint-Basile à la tradition des cadeaux. Pendant des siècles après, les Grecs se donnaient des cadeaux de Noël le jour du Nouvel An, plutôt que le jour de Noël.

Enfin, pour mes amis virtuels grecs présents sur les blogs les-amis-des-nours, les-anges-noir-666 et les-babies-anges-noirs, je vous offre comme cadeau de Saint-Basile cette très belle image de la Vasilopita, le premier dessert que l'on déguste après le compte à rebours et la réception de la nouvelle année, elle contient aussi une pièce de monnaie, et celui qui gagnera la pièce "plaqué or" aura de la chance. J'espère que ça vous plaira :