Agathe de Catane, une martyre particulièrement célébrée

Entre la fin d'année 249 et le mois de janvier 250, l'empereur Dèce met en place un édit obligeant au sacrifice obligatoire aux dieux, mais il ne semble pas que les chrétiens étaient personnellement visés à travers cette initiative fut mise en place pour mettre en avant le loyalisme, et le refus était puni d'emprisonnement, conduisant malgré eux les magistrats municipaux, car certains avaient des proches chrétiens, à incarcérer les récalcitrants avec l'aggravation des mauvais traitements pour les fautifs.

La cité de Catane en Sicile qui était une ville prospère et riche, située dans une excellente position géographique et son grand port était un point d'échange commercial et culturel animé pour toute la Méditerranée, ce qui peut expliquer que l'édit y fut très appliqué. Née en 235 à Catane dans une famille riche et noble de foi chrétienne, propriétaires de maisons et de terres cultivées tant dans la ville que dans les environs, Agathe fut sans doute particulièrement visée, car des notables locaux furent touchés par cette persécution, et sa qualité de vierge consacrée qu'elle devint à l'âge de 15 ans y aidait beaucoup, ces dernière ne portent pas de voile spécial, mais on leur propose de mettre le voile comme Tertulien, elles continuent à vivre dans leur famille, et il n'y a pas de trace en vie communautaire, à cela s'ajoute le problème de celles qui vivent avec un ascète, mais les vierges n'étaient pas encore mise au rang d'un ordre spécial, mais la Didascalie les mets à la suite des évêques des prêtres et des diacres, malgré cela ces dernières s'engagent à un véritable vœu de chasteté qui est un engagement privé, et leur fonction semble prendre une forme précise. Les femmes étaient généralement dépouillées de leur bien et envoyées en exil. Entre la fin d'année 249 et le printemps 250, Agathe ne semble pas atteinte par la persécution, ni envoyée en exil, mais de rang noble, ses biens furent sans doute confisqués, si elle est poursuivie sans doute en 251, c'est qu'elle a persisté dans son refus de sacrifier, sans doute refusa-t-elle aussi de produire un document, le libellius, disant qu'elle a sacrifié sans le faire donné par le magistrat de la cité, ou d'envoyer un païen sacrifier pour elle, et elle est gardé en prison jusqu'à l'arrivée du proconsul.

Lorsque que les condamnations avaient lieu, elles relevaient du contexte local, et visaient les sectes interdites plutôt que le sacrifice, et les accusés devaient se présenter devant le gouverneur, seul habilité à condamner à mort, lorsqu'il tenait ses assises dans la cité. Il réitérait l'ordre de sacrifier, puis précédait à un interrogatoire en règle, où les accusés devaient s'affirmer à plusieurs reprises chrétiens, et il devait observer le niveau de responsabilité qu'ils avaient dans l'Église et de quels courant ils venaient. Sur la pancarte que portait le condamné à mort jusqu'au supplice indiquait le nom du condamné et le motif de sa condamnation. Certains étaient des notables comme Pionios à Smyrne. On centrait la condamnation sur la hiérarchie de l'Église pour décapiter l'appareil ecclésial dont commençaient à faire partie les vierges consacrées, même si dans la mosaïque du VIe siècle de Saint Apollinaire le Neuf à Ravenne, Agathe est représentée avec une longue tunique, une dalmatique et une étole sur l'épaule, vêtements qui suggèrent qu'elle était devenue diaconesse. C'est le gouverneur de la Sicile qui s'occupa de son cas en 251, face à cette une récalcitrante à l'édit impérial, sans doute comme Pionios de Smyrne elle fut sans doute torturé, on lui demanda à plusieurs reprises : "Voulez-vous vous sacrifier ?", elle refuse à plusieurs reprises, et elle est finalement condamné à être brûlée vive.

Lors de la persécution de Dèce, les condamnations à mort furent rares comme pour Agathe, on utilisa massivement la prison, où certains périrent et d'autres survécurent. Les arrestations se déroulaient par petit groupes de quelques personnes, et comme le montre Cyprien de Carthage qui donne en 250 la liste de 19 martyrs morts sous la torture ou sous de très dures conditions de détentions, 65 s'exilèrent volontairement ou non. On a cessé d'appliquer l'édit de Dèce à la fin de l'année 250. Si Agathe est morte en 251, elle a sans doute subi une persécution locale, car à ce moment-là, l'empereur Dèce ne s'intéresse plus vraiment aux chrétiens. Plus tard, la 'Passio Sanctae Agathae' datant de la seconde moitié du Ve siècle et dont il existe trois traductions, une latine et deux grecques, vint agrémenter le martyr d'Agathe, mais n'a pas de valeur historique, son culte jouit très tôt d'une grande popularité tant en Sicile où elle est invoquée contre les éruptions de l'Etna qu'en Italie où des églises lui sont dédiées au Ve siècle tant à Rome qu'à Ravenne - d'où sa place dans la grande procession martyriale.

La première occasion officielle de célébrer Sainte Agathe est venue à leur retour des habitants de Catane avec les restes de la sainte qui avaient été volés. C'était le 17 août 1126 et pendant la nuit les citoyens se sont rués dans les rues de la ville pour remercier Dieu d'avoir rendu, après 86 ans, la dépouille de la bien-aimée martyre Agathe. Une date dont on se souvient encore aujourd'hui avec une plus petite procession du cercueil et du buste reliquaire dans les rues du centre. Initialement de nature exclusivement liturgique, ce n'est qu'avec la construction de la "vara" en 1376 que les célébrations ont commencé à prendre une forme plus proche de celle d'aujourd'hui avec le début des processions dans les rues de la ville de Catane. Avant, seul le voile de la sainte était porté en procession. Peu à peu à la fête purement religieuse s'ajoute une fête plus populaire, voulue par le Sénat et le peuple, où les liturgies s'accompagnent de représentations d'une autre nature. C'est l'origine d'une fête civique qui caractérise encore les célébrations de la Sainte Agathe et qui, jusqu'à presque la fin du XVIIe siècle, se déroulait en un seul jour, celui du 4 février. À partir de 1712, compte tenu de l'importance grandissante de l'événement, les jours de fête deviennent deux, sans doute parce que la ville s'est tellement agrandie qu'une seule journée ne suffit plus pour faire le tour des différents quartiers.

La fête dure aujourd'hui du 3 au 5 février, se terminant de plus en plus souvent en fin de matinée le 6. Il s'ouvre le 3 février avec une procession à midi de onze cadalores, de grandes structures en forme de bougie symbolisant les guildes et deux voitures appartenant à l'ancien Sénat local avec les plus hautes autorités religieuses et civiles de Catane pour ce que l'on appelle le défilé de la calèche datant XVIIIe siècle. Il se termine le soir sur la Piazza Duomo, où se trouve la cathédrale Sainte-Agathe, avec un feu d'artifice. Le matin du 4, une statue de sainte Agathe tenant ses reliques est placée sur un fercolo (machine qui est utilisée pour mettre en procession simulacres des saints) en argent de 40 000 livres , ou calèche, et transportée dans la ville par des fidèles jusqu'à ce qu'elle soit ramenée à la cathédrale tard dans la nuit, ou parfois même à l'aube. Le 5 au matin, la messe est célébrée à la cathédrale. Tout au long de la journée, le buste reliquaire de sainte Agathe y est exposé. Dans l'après-midi, il est emmené pour une autre procession, se terminant au petit matin du 6. lors de la fête, il est habituel de déguster le «Cassateddi de Sant'Aita» aussi appelé «Minni de Sant'Aita», des bonbons de forme ronde à base de génoise imbibée de rosolio et farcie de ricotta, de pépites de chocolat et de fruits confits, qui concerne le martyre et l'arrachement brutal des seins dont a été victime la jeune fille, un bon nougat aux noisettes, ou l'olivette typique de la Sainte Agathe, des bonbons à la pâte d'amande verte, qui rappellent juste les olives, faisant référence à la légende où un jeune homme, chéri par les gens de Quintianus. En s'arrêtant pour se reposer, il vit surgir de nulle part l'olivier qui le protégeait de la vue des gardes et lui donnait des fruits à manger.

Ainsi, pendant trois jours, la ville de Catane oublie tout pour se concentrer sur la fête qui attire du monde chaque année. Entre fidèles et visiteurs cela peut faire jusqu'à un million de personnes.