Cette image de Kenshin le vagabond me rappelle la période historique du Bakumatsu. Regardons cela de plus près.
Le Japon a connu 250 ans de paix relative sous l'autorité des shogun (le chef militaire) de la famille TOKUGAWA, lors de la période dite d'Edo (1603-1867) du nom de la ville où siégeait le bakufu (le gouvernement militaire). L'instauration de la paix et de la stabilité fut rendue possible grâce aux décisions imposées par la dictature shogunale : l'établissement d'un système féodal très strict et hiérarchisé empêchant les conflits internes, et l'application de la politique de sakoku (d' isolationnisme) c'est à dire la fermeture du pays aux étrangers qui dura près de 200 ans. Cependant, les Occidentaux allaient intervenir militairement pour forcer un Japon en marge du progrès à s'ouvrir au commerce international. Ceci provoqua une prise de conscience collective des japonais quant à leur retard économique et industriel. Les réactions furent diverses et l'émergence d'idées nouvelles finit par diviser le pays et remettre en question le pouvoir du shogun. Ces divisions allaient se régler dans le sang et entraîner la chute du régime en place. Bakumatsu (la fin du bakufu) est le nom donné a cette période charnière de l'histoire du Japon qui marque la brusque transition de l'époque médiévale à la l'époque moderne. La portée symbolique de ces événements est à mon sens très forte et représentative de l'esprit du Japon, toujours oscillant entre tradition et modernité.
Le 8 juillet 1853, les quatre "vaisseaux noirs" du commodore Matthew PERRY de la marine américaine, débarquent dans la baie d'Edo, afin de transmettre des lettres du gouvernement américain destinées à l'Empereur (ils ignoraient que l'Empereur ne tenait plus qu'un rôle religieux et honorifique, le véritable pouvoir appartenant au shogun). La puissance de ces "vaisseaux noirs" (des bateaux à vapeurs équipés de canons) impressionna fortement la population japonaise qui pris conscience de son retard militaire. Les Américains, eux, étaient déterminés à se voir accorder un droit d'accès aux ports japonais ; si ce n'était pas de plein gré, alors ils obtiendraient l'ouverture du pays par la force. C'est ainsi qu'au retour du commodore PERRY, le 13 février 1854, le shogun cède devant la puissance américaine et accepte de signer un premier traité commercial avec les Etats-Unis garantissant l'ouverture de deux ports : Shimoda et Hakodate. Rapidement, des accords similaires sont signés avec d'autres nations (Grande-Bretagne, France, Pays-Bas, Russie), trop heureuses de profiter d'une telle aubaine. Mais si la présence des étrangers fut bénéfique pour l'essor de l'économie locale, elle n'en suscita pas moins de vives réactions parmi les Japonais.
En effet, le Japon était considéré comme une terre sacrée par ses habitants, une grande partie de la population trouva donc scandaleux que des barbares puissent en fouler le sol. Accusant le bakufu de s'être compromis en ouvrant le pays, les plus extrémistes prônèrent donc l'expulsion des étrangers, et, par la même occasion, se réclamèrent de l'Empereur dont ils espéraient rétablir le pouvoir et la dignité. Les plus virulents de ces opposants au shogun étaient les han (les clans) de Satsuma, Tosa et surtout Choshu. D'autres, au contraire, réaffirmèrent leur soutien indéfectible au shogun ; mettant de côté leurs idées conservatrices et xénophobes, ils comprirent qu'ils avaient tout intérêt à apprendre auprès des Occidentaux comment moderniser leur pays et surtout leur armée.
Dès 1860, avec l'assassinat du tairo (le "grand ancien", ministre principal du shogun), le clan Choshu et ses alliés multiplièrent les actes terroristes contre les étrangers et contre le bakufu. Les Occidentaux et le bakufu répondirent par de violentes représailles et durcirent la répression des révolutionnaires. Kyoto, la capitale impériale, va alors devenir le théâtre de toutes les intrigues. La ville était notamment protégée par une milice au service du bakufu appelée Shinsen Gumi. Le Shinsen Gumi était le denier rempart face aux patriotes du clan Choshu. Ils étaient réputés autant pour leur fidélité implacable au shogun que pour leur école de sabre, nommée Tennen Rishin Ryu, qui enseignait une technique d'escrime particulièrement expéditive. Les deux factions s'affrontèrent au cours de combats sans merci, ponctués le 5 juin 1864 par l'affaire Ikedaya (= auberge Ikeda) : un groupe de 40 hommes du Shinsen Gumi pénétra dans l'auberge et massacra une trentaine de samouraïs partisans du clan Choshu. Le Shinsen Gumi, en infériorité numérique (de l'ordre de 1 contre 3), n'essuya que 2 pertes. Devant cet état de guerre civile latente, le bakufu modernise son armée régulière en l'équipant de fusils et de canons. Les partisans du clan Choshu finissent à leur tour par réaliser qu'ils ne peuvent vaincre les Occidentaux et leur puissante flotte, ils acceptent alors également de se servir d'armes modernes et reçoivent même l'aide d'un escadron britannique. En 1866, TOKUGAWA Yoshinobu est élu 15ème shogun, à la mort de son prédécesseur. Dans l'ombre des combats, les négociations s'activent pour la réédition du bakufu et la restauration de l'Empereur. Le 14 octobre 1967, le bakufu accepte la requête demandant la restitution du pouvoir à l'Empereur et reçoit l'approbation de la cour impériale. Le shogun démissionne le mois suivant. Peu de temps après la démission du shogun, en décembre 1867, l'Empereur KOMEI meurt. En janvier 1868, son héritier MUTSUHITO âgé de 14 ans est proclamé au pouvoir et bascule dans le camp des samouraïs de Tosa, Choshu et Satsuma qui écrasent les dernières résistances de l'armée du shogun. Le nouveau gouvernement (composé exclusivement d'hommes de Tosa, de Choshu et de Satsuma) s'installe à Edo qui devient la capitale impériale (la ville sera rebaptisée Tokyo en 1869). Le Japon adopte alors les techniques et les institutions occidentales afin de devenir une grande puissance économique et politique. On appellera cette période du Japon contemporain ère Meiji, "ère des Lumières" (1868 - 1912). L'Empereur MUTSUHITO recevra également, à titre posthume, le nom de MEIJI.
C'est une période historique qui a permise au Japon d'entrer dans le monde moderne et qui a mit fin à l'ère médiévale. Beaucoup de mangas s'en inspirent dont Kenshin le Vagabond, ce qui n'est pas étonnant. Car tout dans cette période permet de construire un bon scénario.
Bonne lecture. Vous pouvez prendre l'image si vous voulez.
Merci !
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